La conduite de changement doit-elle se faire sans le permis de penser le passé ?

Au cœur d’une entreprise en mouvement, la conduite du changement est devenue l’arme du manager pour poursuivre l’innovation au sein de son département.

Certains opposent même maintenant l’esprit des start-up (ensemble d’êtres humains qui portés par l’enthousiasme du projet consomment de la monnaie sans compter) à celui des PME (ensemble d’êtres humains qui portés par l’enthousiasme du projet consomment du temps en comptant la monnaie).

Dans le premier cas, ils innoveraient sans cesse, c’est aussi un peu plus simple de piloter quand il n’y a qu’un client à convaincre : l’investisseur.
Dans le second cas, comme l’on passe du temps à mesurer l’impact que cela peut générer sur ses clients ou ses futurs clients, le DAF a tellement mis de temps à faire le budget prévisionnel de l’hypothèse, que l’innovation a déjà été sortie par le concurrent.

Donc, pour répondre aux attentes des clients qui évoluent, la PME fait évoluer ses méthodes et sa structure, et pourtant parfois cela peut paraître comme une régression.

Prenons l’exemple de la gastronomie, une génération a tellement voulu la faire évoluer, qu’elle a inventé la cuisine moléculaire…10 ans plus tard, cette génération s’aperçoit que les savoir-faire de la cuisine par exemple d’Alain Chapel étaient perdus, elle est même qualifiée de cuisine vintage par Monsieur Maximim.

C’est un peu comme la décoration, lorsque c’est vintage, c’est mieux. Le vintage caractérise les objets ou les tendances jusqu’aux années 80, il donnerait un sentiment de réassurance aux hommes et femmes de 40 à 50 ans, comme si une part de leur enfance s’était réinsérée dans leur quotidien.

Alors, pourquoi la gastronomie a-t-elle du mal à renouer avec cette période ? D’abord à cause du goût, qui a été moins développé. Avec l’heureuse émancipation de la femme dans les années 68 (et c’est tant mieux), la transmission de la culture du goût s’est petit à petit perdue. Aujourd’hui, on ne remonte plus aux cuisines de nos mères pour le retrouver, mais à celles de nos grands-mères. Enfin, le temps depuis 20 ans doit être raccourci, le temps pour mijoter un jus, les temps de pause de cuisson d’une viande, plus rien n’est plus respecté car nous sommes entrés dans l’ère du wifi haut débit où tout doit aller vite, très vite, trop vite…

Certains se disent qu’il faut retrouver des valeurs…

Cependant, au cœur de l’entreprise, changer c’est soutenir ses collaborateurs lors des transformations et gérer les résistances qui peuvent apparaître. Des résistances, une réaction naturelle à toute situation nouvelle.

En réalité, plus le manager inscrit son entreprise dans une idée d’évolution, et même si elle vient puiser des recettes dans le passé pour réussir, plus nous générons de la peur.

D’après Sénèque « Ce n’est pas le changement qui fait peur aux gens, mais l’idée qu’ils s’en font ».

En réalité, le manager doit accepter que dans un monde qui va vite, la période de changement s’effectue en continue sur plusieurs séquences, et n’est plus une période de transition classique allant d’un point A vers un point B. Ainsi, les phases intermédiaires qualifiées d’instables sont plus fortes avant d’arriver au point culminant de la situation stable.

Comment expliquer au secteur d’activité de la restauration, que le point B doit prendre sa source dans le passé pour réussir demain ?

Comment expliquer à un vigneron que les 30 dernières années passées à traiter la vigne en pensant la soigner, n’ont peut-être pas été les meilleures d’un point de vue de méthode ?

Comment expliquer que le progrès, ce n’est pas obligatoirement des fraises en hiver, alors que le consommateur s’est habitué à en trouver ?

Ainsi, pour réussir ce retour dans le futur en passant par le passé, il faut envisager de renforcer l’écoute active pour créer une atmosphère de bienveillance et d’intérêt porté à l’autre.

Il faudra que ceux qui portent la vision et s’inscrivent dans le mouvement acceptent de façon inconditionnelle l’autre, et comprennent ses points de vue pour ensuite lui apporter les meilleurs éclairages. L’enjeu : conduire l’autre vers la réussite, qui inclut la protection de notre environnement et l’enseignement de l’expérience des anciens.

Créer de l’innovation demain, ne consistera plus à partir d’une feuille blanche. Ce sera l’intelligence collective qui triomphera, car elle sait faire la synthèse des enseignements du passé, pour l’offrir en quintessence de progrès.

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